UNE CATASTROPHE NUCLÉAIRE ET HUMAINE

Publié le par Résistance verte

 

Le 11 mars, cela fera 10 ans qu’une catastrophe nucléaire majeure débutait avec la fusion de trois réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi, exploitée par TEPCO. Aujourd’hui, les victimes de la catastrophe continuent de se battre pour faire valoir leurs droits et porter leur cause à une échelle internationale.

 

Mizue Kanno, évacuée de la ville de Namie, à 20km de la centrale de Fukushima-Daiichi. Elle souffre d’un cancer de la thyroïde depuis 2016 : « Tant que nous nous accrocherons à l’énergie nucléaire, ce qui m’est arrivé pourrait vous arriver n’importe quand. Le 11 mars, j’ai été contrainte d’abandonner mon ancienne vie. Vous, par contre, vous êtes toujours le 10 mars, et vous avez le choix. Votre 11 mars peut être différent du mien ».

 

Mari Suzuki, porte-parole d’une association d’aide aux victimes dans la ville de Sukagawa, à une soixantaine de kilomètres de la centrale de Fukushima-Daiichi. Elle aide les victimes à se reconstruire par le théâtre : « J’ai l’impression que beaucoup de gens ne veulent pas être perçus comme étant en désaccord avec les autorités à cause d’une pression invisible qui les empêche de manifester leur mécontentement […]. Si l’expérience [des victimes] au sein de la troupe de théâtre leur a permis de mieux appréhender les choses et de réfléchir de manière critique, peut-être pourront-ils s’exprimer plus sincèrement au sujet de Fukushima. Je l’espère, en tout cas ».

 

Rianne Teul, experte en radioactivité pour Greenpeace : « Je pense qu’il y a un profond manque de compréhension de l’impact de l’accident sur la vie des gens. La propagation des radiations nucléaires est invisible et les impacts ne se manifestent que sur de longues périodes. Il n’y a pas de scènes dramatiques, de débris qui volent dans les airs. [A cause de cela,] le lobby nucléaire a souvent dit que « personne n’était mort à cause de l’accident de Fukushima-Daiichi », mais c’est beaucoup trop réducteur ».

 

Minoru Ikeda, ex-employé d’une société de décontamination des sols : « Il y a encore une importante main-d’œuvre qui travaille à Fukushima-Daiichi et sur les autres sites de décontamination. Ils doivent toujours faire face à de mauvaises conditions de travail dans un environnement hostile ».

 

Haruo Ono, pêcheur de la préfecture de Fukushima, lutte contre le rejet des eaux contaminées dans l’océan Pacifique qui risquent de mettre un terme à l’activité de l’ensemble des pêcheries de la région : « Même si nous sommes de nouveau autorisés à vendre nos prises, je ne peux sortir en mer que dix fois par mois pendant les jours autorisés […]. Nous sommes encore loin de pouvoir pêcher comme nous le souhaitons ».

 

Akiko Morimatsu, évacuée « volontaire » de la ville d’Iitate à 60km de la centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi. Grâce à une aide de l’Etat pour aider les personnes à quitter des zones contaminées (en dehors des zones d’évacuation), Akiko a pris la décision de déménager à Osaka en 2011. En 2020, cette aide a été suspendue et certain·es évacué·es « volontaires » ont été contraint·es de revenir dans des zones qui restent contaminées : « Toute personne évacuée qui ne provient pas de la zone délimitée par le gouvernement est qualifiée de « volontaire ».  Je pense que cette catégorisation donne l’impression que l’évacuation était pour eux un luxe […]. L’ironie, c’est que ces catégories ont été inventées par les responsables de l’accident – le gouvernement japonais et TEPCO ».

 

Norio Kimura, évacué de la ville d’Okuma, où se trouve la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. Il a perdu dans le tsunami son père et sa fille, Yuna, dont les restes n’ont été que partiellement retrouvés, probablement enfouis sous des déchets contaminés entreposés par les autorités sur le terrain de son ancienne maison : « Je sais que Yuna est toujours quelque part là-dessous. […] C’est presque comme si elle se cachait, pour s’assurer que ce qui s’est passé ici ne soit pas oublié ».

 

Kenta Sato, membre de plusieurs projets locaux visant à la revitalisation de la ville d’Iitate, à 60km de la centrale de Fukushima-Daiichi. Il est investi dans la vie politique de sa commune et a été inquiet de voir l’ordre d’évacuation de la ville levé en 2017 : « Je me demande vraiment si le processus de décontamination [des terres arables] a eu un quelconque effet. Les substances radioactives sont absorbées par les racines des plantes et des arbres, puis sont progressivement libérées dans l’environnement. Les trois quarts de la ville d’Iitate sont couverts de forêts dont la plus grande partie n’a pas été décontaminée ».

 

Mai Suzuki travaille pour Greenpeace Japon. Elle revient chaque année à Fukushima pour effectuer des mesures de la radioactivité : « Le gouvernement prétend qu’un peu de travail de décontamination peut régler le problème, mais grâce aux données de mesure, nous sommes capables de montrer que le problème n’a pas du tout disparu ».

 

Naoto Kan, ex-Premier ministre du Japon (2010-2011), était en poste lors de l’accident nucléaire de Fukushima. Il a démissionné quelques mois plus tard et est devenu un fervent militant de la cause antinucléaire auprès des institutions internationales : « Nous ne savons pas quand et où aura lieu le prochain accident; ce qui est sûr, c’est qu’il se produira. C’est pourquoi les centrales nucléaires ne devraient pas être construites aussi près des populations . Si nous appliquons ce principe au Japon, […] il n’y a aucun emplacement approprié pour une centrale nucléaire. Si ce principe devait être adopté au niveau mondial, l’énergie nucléaire appartiendrait bientôt au passé ».

 

Aileen Mioko Smith, militante environnementale et présidente de l’ONG environnementale et anti-nucléaire Green Action :> « Une conversation que j’ai eue avec une vieille dame qui vivait près d’une centrale restera à jamais gravée dans ma mémoire. Elle me disait que « le plus grand mal que la centrale nous a fait a été de faire en sorte que la ville ne décide plus rien par elle-même ».  Il s’agit d’un problème systémique, et sans changements structurels […], les mêmes problèmes subsisteront même après la fermeture des centrales et leur démantèlement […]. Ce système qui crée une dépendance économique à l’égard de l’énergie nucléaire est d’une certaine manière plus problématique que l’énergie nucléaire elle-même ».

 

Ruiko Muto, militante anti-nucléaire, cheffe de file d’une class action contre l’ancienne direction de TEPCO, l’opérateur de la centrale de Fukushima-Daiichi : « Lorsqu’une ville qui a accueilli une centrale nucléaire est victime d’un accident, ce devrait être une occasion en or de mettre un terme à cette activité. […] Mais paradoxalement, nous replongeons dans notre dépendance à l’énergie nucléaire au nom du développement ».

 

Toru Anzai, agriculteur évacué de la ville d’Iitate à 60km de la centrale de Fukushima-Daiichi. Il est photographe amateur et documente les conséquences de l’accident nucléaire de Fukushima pour que sa mémoire et celle des autres victimes ne tombent pas dans l’oubli : « On dit qu’une seule photo peut émouvoir le monde. J’espère pouvoir laisser une trace de ce dont j’ai été témoin à Fukushima, afin que dans 50 ou 100 ans, les gens sachent ce qui s’est passé ici ».

 

Kaori Suzuki, directrice du Laboratoire d’étude des radiations des Mères de Fukushima, association qui effectue des analyses radiologiques (que l’Etat ne pratique plus assez) et contrôle les niveaux de contamination des aliments. Le laboratoire prend aussi en charge médicalement et psychologiquement des victimes : « Nous avons besoin que le monde comprenne à quel point la vie quotidienne a changé à Fukushima. Il est impératif que la même chose ne soit jamais plus infligée à une autre population. En tant que personne vivant chaque jour dans cette nouvelle réalité post-Fukushima, je pense que nous avons le devoir de nous exprimer et de partager nos expériences ».

 

Masashi Goto, ancien ingénieur nucléaire et membre d’une commission citoyenne sur le nucléaire : « TEPCO prétend avoir un projet de démantèlement qui peut être réalisé dans les 30 à 40 prochaines années, mais c’est complètement irréaliste : 30 ans est le délai minimum absolu pour le démantèlement planifié d’une centrale qui n’a pas subi de dommages lors d’un accident. Étant donnés la gravité de ce qui s’est passé et l’état actuel des réacteurs de Fukushima Daiichi, nous envisageons un processus qui durera entre 100 et 200 ans ».


 
L’accident nucléaire de Fukushima a eu lieu au Japon à la suite d’un séisme et d’un tsunami. Mais, comme le rappelait en 2016 l’ancien directeur de l’Autorité de sûreté nucléaire, Pierre-Franck Chevet : « un accident majeur, comme ceux de Tchernobyl ou de Fukushima, ne peut être exclu nulle part dans le monde, y compris en Europe ».

Les centrales nucléaires les plus vétustes qui ont dépassé les 40 ans, comme celle du Tricastin, doivent fermer.
La pétition Stop Tricastin
https://www.greenpeace.fr/tricastin-40-ans-ca-suffit/

 

https://www.greenpeace.fr/fukushima-une-catastrophe-nucleaire-et-humaine/

 

 

40 ans, ça suffit ! Pourquoi les vieilles centrales nucléaires doivent fermer
https://www.greenpeace.fr/40-ans-ca-suffit-pourquoi-les-vieilles-centrales-nucleaires-doivent-fermer/

Durée d’exploitation des réacteurs nucléaires de 900 MWe en France : la prolongation en question
https://www.greenpeace.fr/duree-dexploitation-reacteurs-nucleaires-de-900-mwe-france-prolongation-question/

L’échéance des 40 ans pour le parc nucléaire français
https://www.greenpeace.fr/lecheance-40-ans-parc-nucleaire-francais/

Revoir notre action à la centrale du Tricastin le 21 février 2020.
https://www.greenpeace.fr/action-demantelement-de-la-centrale-nucleaire-de-tricastin/

 

Publié dans Nucléaire

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