DÉVIATION DE SAINT-PÉREY : LES BULLDOZERS DE RETOUR EN ARDÈCHE

Publié le par Résistance verte

À Saint-Péray, en Ardèche, un chantier de déviation routière a repris, malgré les menaces qu’il fait peser sur des espèces protégées. Les opposants au projet de déviation routière de Saint-Péray (Ardèche) ont réinvesti des installations bâties en 2024, au début de leur lutte.

© Pauline De Deus / Reporterre

Plus de 1 hectare de végétation a déjà été détruit sous les yeux des opposants, installés dans les arbres.

« Il y avait des pieds de vigne et, de ce côté, c’était une friche sauvage », indique Simon. Le 2 septembre, en quelques heures, ce militant a assisté au défrichement de plus d’un hectare de terre agricole entre les villages de Cornas et Saint-Péray, en Ardèche. Une zone où un diagnostic archéologique doit être réalisé ces prochains jours dans l’optique de construire une déviation routière de 1,7 km entre Saint-Péray et Valence (Drôme).

« Ici, un pin a même été déraciné et le tracteur a fait plusieurs allers-retours dessus pour le broyer complètement », raconte-t-il, encore affligé par la scène. Depuis une semaine, comme une dizaine d’autres personnes, cet habitant du secteur passe le plus clair de son temps perché dans une cabane, construite une semaine plus tôt, pour tenter de protéger les arbres au milieu du tracé de la déviation et, plus largement, la plaine de Saint-Péray.

Un engin arrache des pieds de vigne, sous le regard d’un policier. © Collectif de la plaine

« À force de passer du temps sur place, on découvre de nouvelles espèces tous les jours », s’enthousiasme le militant. Le faucon crécerelle qui s’arrête chaque soir, la visite des mésanges le matin, l’impressionnant terrier de renard caché par les herbes, les écureuils dans les arbres voisins… Alors qu’il liste les animaux observés sur le site, son voisin l’arrête : « Regarde, ce sont des gobemouches noirs, ils sont en migration. »

D’après l’étude réalisée par la communauté de communes Rhône Crussol, les effets du projet routier sur ces oiseaux migrateurs protégés en France, comme sur les autres espèces animales et végétales, sont jugés faibles, voire positifs du fait des mesures compensatoires (plantation d’arbres, éclairage réduit, aménagement d’un pont afin de favoriser l’envol des chauves-souris).

Une analyse contestée par les fédérations locales de France Nature Environnement (Frapna Drôme et Ardèche) et l’association Alterre, qui ont saisi le tribunal administratif de Lyon et obtenu la suspension des travaux à l’automne 2024. Après ce rappel à l’ordre, la préfecture de l’Ardèche avait enjoint la collectivité à demander une dérogation pour la destruction des espèces protégées (1)

Une victoire en demi-teinte pour les opposants : l’arrêté offrait, en parallèle, la possibilité de reprendre les travaux dès le mois de septembre pour préparer l’installation d’un pont-rail (prévue en mai 2026 dans la convention avec la SNCF) avec un diagnostic archéologique.

Dans l’attente du tribunal administratif

Quelques jours plus tôt, le sénateur écologiste du Rhône Thomas Dossus, en visite sur le chantier, avait précisé que ces travaux ne permettront pas de réaliser un recensement objectif des espèces protégées : « Cette contradiction entre la volonté affichée de vouloir faire cette étude et celle d’avancer sur les travaux, on la retrouve régulièrement sur des projets routiers de ce type, qui mitent le territoire et bétonnent, en enfonçant la France dans un modèle du tout routier où on ne cherche pas d’alternative. »

En l’occurrence, plus de 1,5 hectare devrait être défriché et déboisé pour réaliser l’évaluation archéologique d’ici à la fin du mois. « De lourdes pelleteuses vont arriver sur les lieux incessamment sous peu pour creuser une centaine de tranchées de 10 m de long, 1 m de large et 2 m de profondeur », alerte Simon.

La zone concernée par le projet de travaux : plus de 1,5 hectare doit être défriché et déboisé d’ici à la fin du mois de septembre. © Collectif de la plaine

Si les trois associations opposées au projet ont déposé un référé-suspension, il faut attendre une dizaine de jours avant que le tribunal administratif ne prenne sa décision. En attendant, le collectif de la plaine de Saint-Péray cherche à mobiliser. « Même s’il y a du monde dans les arbres, on a besoin de personnes à terre, qui s’occupent de documenter, de tracter, ou même de dons, qu’ils soient matériels pour les personnes dans les arbres ou financiers pour la bataille judiciaire », listent des membres de l’association Alterre.

En ce dimanche ensoleillé, une vingtaine de personnes se sont réunies face à la gare de Saint-Péray — où les trains de voyageurs ne circulent plus depuis les années 1970 — pour soutenir ou découvrir la lutte. Dans l’assemblée, les idées vont bon train : événements, réunions, communication… Mais le temps presse. Écureuils dans les arbres ou pas, dès lundi 8 septembre au matin, les engins étaient sur le terrain, soutenus par les forces de police.

Article de Reporterre

Notes

(1) Pris le 14 mars 2025, cet arrêté préfectoral n’a pas été mis à la disposition du public et reste introuvable sur le site internet de la préfecture, où il devrait pourtant apparaître. Seul un communiqué de presse résume la décision en quelques lignes.

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