COUP DE GUEULE CONTRE LA "JOURNÉE DU NUMÉRIQUE"
Plusieurs acteurs stéphanoise ont organisé une journée promouvant le numérique auprès des jeunes le 14/04 au gymnase Michelon.
Comme le festival "Super Demain" à Lyon, il s'agit de l'un de ces évènements qui promeuvent un monde hyper connecté sans parler des conséquences écologiques ni des risques en matière démocratique.
Nous relayons ci-dessous un coup de gueule contre cette journée que l'on nous a fait parvenir.
« INDUSTRIE NUMÉRIQUE = EFFONDREMENT ÉCOLOGIQUE et RÉGRESSION ANTHROPOLOGIQUE
Portons un regard lucide sur la réalité
Petit rappel : En 2008 tout un discours lénifiant sur le « développement durable » soutenait que la « sobriété » serait acquise grâce à la mise en œuvre de capteurs partout, la dématérialisation des administrations (fermeture de guichet), le télétravail, le e-commerce, les compteurs connectés (linky…), des TICE à gogo etc.
En 2018, le « livre blanc » « numérique et environnement » publié par de grandes organisations avec la contribution du « conseil national du numérique », constate « que des décennies de numérisation de notre société sont aussi celles de la plus forte augmentation de notre empreinte écologique ». Cherchons l’erreur….
1. Le numérique engloutit toujours plus de matières et d’énergie en générant toujours plus de pollutions et d’exploitation humaine.
Il rejette bien plus de CO2 que le transport aérien il n’est pas du tout « carboneutre », contrairement à ce que racontent les médias dominants.
Il est très énergivore : 10 % de l’énergie mondiale en croissance d’environ 9 % par an. Le visionnage de vidéos représente 60 % des flux de données sur internet. La croissance exponentielle du trafic internet exige toujours plus d’électricité pour faire fonctionner et refroidir les data centers (centres de stockage et de traitement des données). L’effet « rebond » ( augmentation du volume des flux) annule tout gain d’efficacité.
Il ne se substitue nullement à la consommation de papiers puisque celle-ci a doublé les 20 dernières années.
L’usine ST microélectronique de Grenoble qui produit des puces électroniques, indispensables au secteur du numérique, s’approprie et dilapide l’eau ultra pure du Grésivaudan (249 litres par seconde) en rejetant de l’eau polluée par les produits chimiques. Bienvenue dans la nappe phréatique ! Il est inadmissible que cette industrie ait reçu 2,9 milliards d’euros de la part de l’État pour son agrandissement.
Le ballet ininterrompu des containers, consécutif à la dissémination des lieux de production, enrubanne la planète. Et toute la quincaillerie électronique et numérique obsolète, finit dans les décharges au Ghana (ou ailleurs), véritable dépotoir des pays dits « riches » : 40 000 tonnes par an qui polluent air eau sol et sous-sol, tuant les populations à petit feu. Pour la fabrication de la dite « quincaillerie » les travailleurs en Asie, travaillent à la chaînes 12 heures par jour dans des conditions d’exploitation épouvantables (usines Foxconn = usines aux suicides). Et ce n’est pas un cas isolé dans le monde. Plus près de nous, les manutentionnaires chez la multinationale Amazon triment tels des robots de chair et de sang.
Pour alimenter l’ogre numérique il faut accélérer l’extraction des ressources métalliques, et donc multiplier les mines à travers le monde. L’industrie minière qui saccage des territoires immenses, au mépris des populations locales, est d’abord une industrie de déchets qui produit un cortège de substances toxiques et consomme des quantités d’eau et d’énergie gigantesques. (voir les études de l’association d’ingénieurs géologues Systex)
Dans les mines artisanales de coltan au Congo, agonisent des enfants dès l’âge de 5 ans : 40000 enfants (chiffres de l’UNICEF) dans la riche région minière du Katanga. Ceci est très bien documenté dans le livre de Fabien Lebrun « On achève bien les enfants : écrans et barbarie numérique » Editions « le bord de l’eau ».
La mine « responsable », « éthique » n’existe pas, c’est un mensonge. Voir le livre de Célia Izoard publié en janvier 2024 au seuil, collection écocène, « La ruée minière au XXIe siècle).
Les logiques guerrières accompagnent cet accaparement des ressources. Le numérique sert aussi à faire la guerre et les puces grenobloises équipent les drones KLU-BLA de l’armée russe.
Les énergies dites « vertes » : solaire, éolien, biomasse... et en prime le nucléaire ! qu’on tente de nous faire gober comme des énergies propres sont aussi voraces en métaux rares et tout aussi désastreuses que les énergies fossiles.
« Bilan carbone » ? pensons aussi « Bilan métal » !
Consommation abyssale d’énergies, d’infrastructures, de matériels, Exploitation humaine éhontée : Non Merci !
2. L’assujettissement au numérique attaque fondamentalement notre humanité en particulier notre présence sensible et charnelle au monde
L’usage du numérique distrait en permanence les esprits, vampirise l’ attention, sape les capacités de concentration et de mémorisation, lamine le psychisme, rend les corps de plus en plus passifs (« La fabrique du crétin digital » M. Desmurget).
Plus personne (sauf « conflit d’intérêt) ne s’aviserait à le contester tant c’est documenté par des études internationales.
Le « marché de la donnée » représente « le pétrole du XXIe siècle ». Le traçage et le profilage algorithmiques (la captologie) constituent un conditionnement sans précédent en créant dépendance aux marchandises et addiction aux écrans. Tout cela est très profitable aux géants de la Tech (les GAFAM) et autres startuppers, dont l’emprise émousse notre autonomie et nos capacités de jugement. L’État nous impose les services publics en ligne et renvoie les usagers vers des plateformes numériques : une véritable déshumanisation ! La numérisation institue un contrôle permanent de nos vies, banalisé par la vidéosurveillance, avec laquelle se profile la reconnaissance faciale. Elle nous enferme aussi dans un monde saturé d’ondes électromagnétiques au mépris de notre santé.
Avec l’émergence des IA (intelligences artificielles) génératives, à partir de l’année 2011, nous passons à une autre dimension dans la dépossession de nos facultés mentales. Voyons ce que dit Eric Sadin dans son livre « la vie spectrale » 2024 Editions Grasset.
« Ces IA sont capables d’expertiser des pans entiers du réel à des vitesses infiniment supérieures à nos capacités cognitives….capables de formuler des recommandations à l’intention d’individus ou d’entités. Avec les IA génératives, l’enjeu….consiste à malaxer le réel, à lui insuffler d’autres trajectoires, pour finir par lui superposer une autre réel, un surréalisme algorithmique, excluant toute dimension non schématisable et sensible du réel….Substitution de la conformation programmée au principe de l’aléatoire propre au vivant ». Sadin situe cette mutation anthropologique à la mise sur le marché de l’ANP (assistant numérique personnel SIRI), puis des enceintes connectées « à même de répondre à voix haute à toutes nos interrogations formulées. ; mais n’oublions pas qu’il s’agit d’orienter discrètement nos choix par cet accompagnement algorithmique aux airs bienveillants et protecteurs »
« ...ces IA ne cessant de se perfectionner elles nous proposent à présent de générer du texte, des images à la demande : tel Chat GPT (transformateur génératif pré-entraîné), abjection culturelle et civilisationnelle...Ceci nous déprend de notre capacité à générer du langage et de la représentation ».
« ...en nous suggérant sans relâche d’engager des gestes prétendument les plus adéquats, les IA en arrivent à neutraliser nos propres élans pour leur substituer d’autres mécanismes de l’action, non plus fondés sur la volonté, mais répondant à des stimuli perpétuels...La personnalisation algorithmique et pixellisée de notre rapport au monde, muselle notre puissance agissante, qui dépend de l’exercice de notre propre jugement et engage notre conscience et notre responsabilité. »
Pour conclure ce paragraphe on peut se questionner : que peut « la pensée critique indépendante » défendant les valeurs d’autonomie, de dignité, et de liberté sur les plans matériel, culturel et politique, alors qu’elle est présentée comme « hérétique » face à religion du « progrès qui progresse ». (« Politique » entendu ici dans le sens de l’auto organisation consciente de la société, mouvement d’auto institution.)
Refusons le formatage des cerveaux
3. La numérisation à marche forcée se poursuit en dépit de ses conséquences désastreuses
La France et l’UE en font une priorité inscrite dans les plans de « relance » de « résilience ». Il faut déployer partout la fibre optique et la 5G, si importantes pour le marché de l’internet des objets, de l’agriculture connectée, des jeux vidéo, de la réalité virtuelle, de la télémédecine, de la robotisation des usines, dela surveillance etc. Voilà le beau programme de « la transition écologique et numérique » ! Un oxymore dans les termes ! La loi du 15 novembre 2021 promet de « réduire l’empreinte environnementale du numérique » en s’en remettant aux bonnes intentions (limiter l’obsolescence des matériels) et aux petits gestes : prière de regarder un peu moins de vidéos sur internet, d’éteindre la box la nuit, de changer un peu moins souvent de smartphones… « C’est toujours la même rengaine qui est fredonnée : l’impératif de favoriser le développement de l’innovation numérique dont l’ IA, mais en prétendant se montrer regardant. » (E. Sadin). Comme les gouvernants œuvrent à ce jour en faveur d’un numérique « raisonné » ils lâchent quelques miettes (subventions) pour « éduquer au numérique », ou réduire la fameuse « fracture » ! Un aspect « bienvenu » pour quelques associations ou informaticiens. Bref, ne soyons pas dupes : c’est l’arbre qui cache la forêt de la dévastation globale en cours.
L’État en choeur avec ces philanthropes (!) d’industriels, impose : organisation rationnelle de la ville-machine, maximisation de la productivité (= suppression d’emplois), optimisation des flux de matières et d’énergie, à l’aide de nos 2 nouveaux guides suprêmes : l’IA et la 5G. Rappelons à ces « délirants » fanatiques des injonctions paradoxales, que l’on ne peut réduire l’empreinte écologique et en même temps, multiplier les infrastructures, les matériels, les usages. (il est estimé que l’IA menace à terme 50 % des emplois...)
Le bilan écologique et anthropologique est déjà catastrophique. L’intelligence dont nous avons besoin est celle qui permet de voir la réalité en face, avec lucidité.
La démagogie « transitionnelle » promeut à grand renfort de publicité la substitution de la voiture électrique à la voiture thermique (et bientôt la voiture autonome, sans chauffeur). L’extraction du lithium est une ressource stratégique pour le « tout numérique » et la voiture électrique (nickel, cobalt, cuivre, lithium). Une batterie de Renault Zoé peut contenir 8kg de lithium, pour une Tesla c’est beaucoup plus. On peut trouver sur le site « Reporterre » les articles de Célia Izoard.
4 – Comment une telle initiative « journée du numérique » a-t-elle pu s’ envisager et prendre forme ? Déni de la réalité ? Ultra sensibilité aux injonctions dominantes ? Naïveté? (??)
Quelle monstruosité, cette image de jeunes planant, chacun isolé, dans son casque de réalité virtuelle ! Se peut-il que l’on trouve cela normal, sans le moindre regard critique ? Cette inconscience n’est-ce pas le règne de la soumission , à tous les artefacts futiles et souvent mortifères qui envahissent nos quotidiens ?
A peine lâchés par l’école, où les élèves sont presque constamment soumis à l’emprise des écrans, grâce à la prodigalité des gouvernements depuis 2 décennies, les voilà cueillis par le milieu socio-éduc, pour les ré-enchaîner à de nouvelles prothèses, alors qu’il faudrait les en sevrer.
Pendant que les têtes pensantes (« la caste siliconniène » et autres statuppers), bien amarrées à leurs profits, épargnent eux à leur progéniture ces malédictions addictives. N’oublions pas que les enfants des dirigeants de la silicon valley, sont scolarisés dans des écoles privées sans écran. Par contre cette caste hégémonique, se sert de nos propres enfants pour promouvoir leurs affaires...
Refusons de laisser « divaguer » nos enfants dans les projets métaversés de Mark Zuckerberg
Ne les laissons pas se faire happer par le monde virtuel
Proposons leur de vraies vacances dans le monde réel, avec sevrage numérique
Epargons leur (sous prétexte de les préparter à) un futur sans avenir. »