DES MILLIARDS DE VIRUS DANS 1 MÈTRE CUBE D’ATMOSPHÈRE
Des milliards de virus et de bactéries tombent sur Terre en provenance du ciel. Des microbes qu’on retrouve à 3000 mètres du sol et qui peuvent voyager à des milliers de kilomètres de distance. Il y a des virus au sol, dans les océans, mais aussi dans les airs. C’est d’ailleurs la voie de transmission de bon nombre d’entre eux.
Pour la première fois, ils ont analysé la couche la plus basse de l’atmosphère terrestre (la troposphère) dans le but de quantifier le nombre de virus qui peuvent y circuler. Ils ont dénombré entre 260 millions et sept milliards de virus par jour et par mètre carré. Ces quantités sont 9 à 461 fois supérieures à celles des bactéries. Ces microbes peuvent voyager très loin avant de redescendre sur Terre, grâce à des épisodes pluvieux ou en s’accrochant à des particules de poussière.
"Il y a 20 ans environ, nous avons commencé à trouver un peu partout dans le monde des virus génétiquement très similaires, mais se trouvant pourtant dans des environnements très différents. L'importance du nombre de virus survivant suffisamment longtemps dans l'air explique probablement ce phénomène. Il est tout à fait concevable qu'un virus s'envole d'un continent pour atterrir sur un autre."
Les "pluies" de virus et de bactéries existaient déjà bien avant les observations faites et l’humanité n’a pas pour autant été éradiquée par des épidémies. Au contraire, les chercheurs pensent que ces microbes pourraient avoir des effets positifs sur les écosystèmes qu’ils parcourent.
Ils s’appuient sur de récentes études qui ont montré que les virus jouent un rôle important dans la régulation du carbone dans l’océan. D’autre part, il existe des virus dits bactériophages qui préservent les humains en détruisant des bactéries nocives pour les humains.
https://www.nature.com/articles/s41396-017-0042-4
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LES MICROBES DE L'ATMOSPHÈRE
Les vents transportent, d'un continent à l'autre, des poussières, mais aussi des micro-organismes et des substances toxiques. Ces « passagers clandestins » pourraient transporter des maladies et modifier les écosystèmes.
Chaque année, quelque 2,2 milliards de tonnes de poussière s'élèvent dans l'atmosphère, soulevées principalement par des tempêtes, et circulent autour de la Terre. Cette matière en suspension, nommée aérosols, contient des suies, des polluants, mais aussi de nombreux micro- organismes, tels des bactéries, des virus et des champignons.
Depuis quelques années, nous mesurons et identifions les microbes présents dans l'air des Caraïbes lors des tempêtes de poussière : environ 25 pour cent d'entre eux sont des bactéries ou des champignons pathogènes pour les cultures ou pour les coraux, et dix pour cent sont des pathogènes opportunistes pour les êtres humains, c'est-à-dire qu'ils infectent des individus dont le système immunitaire est affaibli. Ces retombées ont des conséquences directes sur la santé humaine. Lors de l'épidémie de grippe qui tua 20 millions de personnes en 1917, la rapidité avec laquelle le virus a envahi le monde résulterait, en partie, de la propagation de l'agent viral par une tempête de poussière.
Plus récemment, en 2012, nous avons analysé à l'aide des outils de la génomique les poussières arrivant d'Asie, et plus particulièrement de Chine et du Japon. Nous y avons identifié 49 espèces de bactéries et de champignons qui survivent aux dix jours que dure le voyage. Parmi elles figuraient deux espèces pathogènes pour les plantes, les champignons Altermaria infectoria et Chaetomium globosum.
Ces résultats montrent que l'Asie est aussi une source de sédiments aéroportés. En avril 2001, un gros nuage de poussière né dans le désert de Gobi, en Chine, a fait le tour du monde par l'Est, traversant le Japon, l'océan Pacifique, l'Amérique du Nord, l'océan Atlantique et l'Europe. Pendant les événements de tempête de poussière importants, quelque 4 000 tonnes d'aérosols des déserts d'Asie s'abattraient sur l'Arctique toutes les heures. Ce transport est attesté par l'identification de pesticides et d'herbicides trouvés dans des tissus animaux et dans le lait de femmes allaitantes dans les populations indigènes de l'Arctique.
La surface de la mer d'Aral, qui représentait environ 60 000 kilomètres carrés en 1960, a été divisée par deux, car les eaux de source qui l'alimentaient ont été détournées pour l'agriculture. Aujourd'hui, pendant une tempête, la formation de nuages de poussière, riches en pesticides et en herbicides, y est fréquente.
Des micro-organismes et des particules microscopiques d'origine biologique sont bien transportés sur de grandes distances et à haute altitude.
https://www.pourlascience.fr/sd/climatologie/65279les-microbes-de-latmosphere-7131.php
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TOMBÉ DU CIEL
800 millions de virus tombent du ciel tous les jours sur chaque mètre carré de notre planète. Avant la chute, ils auront volé d’un continent à l’autre, portés par les vents de poussières, entre 2 500 et 3 000 mètres d’altitude.
Les virus, dont il existe environ 5 000 espèces (pour près de 200 considérées comme dangereuses), sont des agents infectieux n’étant pas classés dans le monde du vivant. En effet, contrairement aux êtres vivants (catégorie à laquelle appartiennent les bactéries), les virus sont dans l’incapacité de se reproduire par eux-mêmes. Pour se dupliquer, ils doivent parasiter obligatoirement les cellules d’un organisme afin de « pirater » l’ADN de ce dernier et l’obliger à fabriquer d’autres virus. Lors de leur duplication, ces virus peuvent aussi légèrement changer leur patrimoine génétique. Cette variabilité explique que, d’une année à l’autre, des virus saisonniers comme ceux de la grippe peuvent avoir un ADN légèrement modifié. D’où la nécessité de mettre au point un nouveau vaccin.
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TOUS LES VIRUS NE NOUS VEULENT PAS DU MAL
Une centaine d'espèces virales sont pathogènes pour l'homme, mais des milliers d'autres agissent pour sa santé et celle de l'environnement.
Ces étranges micro-organismes entretiennent avec les êtres vivants bien d'autres relations que celle consistant à réussir de temps en temps à infecter leurs cellules et à provoquer des maladies. A cet égard, plusieurs récents travaux de recherche sont venus mettre en lumière non seulement leur omniprésence dans notre environnement, mais aussi la complexité de l'écosystème que les êtres vivants forment avec eux.
Chaque minute, jusqu'à 400.000 virus - et près de 2 millions lors d'un footing - pénètrent dans nos poumons. Voilà l'étonnante conclusion de l'une de ces études conduite sur l'écologie microbienne de l'air par un groupe de virologues et d'écologues répartis entre Vancouver, San Diego et Grenade. Selon leurs analyses métagénomiques, un procédé consistant à étudier le contenu génétique d'un milieu (un échantillon de sol, d'eau de mer ou d'air), une pluie invraisemblable de ces entités invisibles même au microscope optique s'abat continuellement sur nos organismes : « Chaque jour, plus de 800 millions de virus par mètre carré sont soulevés de la surface terrestre et voyagent sur de longues distances vers 3.000 mètres d'altitude avant de retomber sur Terre dans des poussières ou des gouttes de pluie », explique l'écologiste microbienne Isabel Reche, de l'université de Grenade, principale auteure de l'étude parue dans « Nature » .
https://www.nature.com/articles/s41396-017-0042-4
Depuis le retour de l'expédition Tara Oceans, qui a prélevé des dizaines de milliers d'échantillons jusqu'à 4.000 mètres de profondeur pour comprendre ces écosystèmes, les analyses pratiquées par l'université d'Etat de l'Ohio avec des équipes du CEA et du CNRS ont montré que l'immense réservoir marin abrite au moins douze fois plus d'espèces de virus que ce qu'on pensait jusqu'à présent, portant leur nombre à au moins 200.000. Certains chercheurs estiment même que le réservoir océanique pourrait contenir jusqu'à 1 milliard d'espèces virales, chacune ciblant un organisme spécifique pour se reproduire : poissons, planctons, etc. Au total, le nombre de particules virales présentes dans l'eau de mer serait donc proprement astronomique : 1030 (10 puissance 30) par millimètre cube d'eau de mer, selon les premiers travaux sur le sujet rapportés dans « Nature » , soit un chiffre plus élevé que le nombre estimé d'étoiles dans l'univers visible (1024).
https://www.nature.com/articles/nature04160
Leur rôle est essentiel à l'équilibre des écosystèmes marins. « Ils catalysent le cycle des nutriments et régulent la composition microbienne des communautés par mortalité sélective », explique Isabel Reche. Chaque jour, ils tuent ainsi 40 % des bactéries des océans et assurent le bon fonctionnement des écosystèmes. « Si un organisme commence à dominer, à être trop abondant, ils permettent le retour à l'équilibre », explique le biologiste de l'École normale supérieure Chris Bowler, qui a décortiqué une partie des échantillons de Tara.
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POMPE BIOLOGIQUE
Leur rôle ne se limite pas à réguler le vivant. Les virus sont également impliqués dans la machine climatique aux côtés des courants qui entraînent les eaux de surface chargées en gaz carbonique dissous vers les profondeurs : ils participent à la séquestration du CO2 en tuant toutes sortes d'organismes gros consommateurs de dioxyde de carbone, tels que les phytoplanctons. Les chercheurs nantais qui ont mis ce mécanisme en évidence dans une publication (https://www.nature.com/articles/nature16942) après avoir passé au crible les millions de données collectées par Tara Oceans (8 téraoctets au total) parlent d'une « pompe biologique organisée s'apparentant à un réseau social qui crée les interactions nécessaires à l'équilibre global du système climatique ».
Et sur Terre ? Parmi les 3.600 espèces décrites par la communauté scientifique, seulement 129 sont pathogènes pour l'homme. La majorité des autres nous protège : elles détruisent les bactéries nocives pour l'homme. Les scientifiques les appellent des bactériophages ou virus thérapeutiques, cette famille étant connue depuis déjà une centaine d'années.
Le mécanisme de contamination mis en œuvre par ces micro-organismes est redoutablement efficace : leur enveloppe est dotée de récepteurs qui reconnaissent une protéine spécifique de la surface bactérienne. Une fois amarrés, ils produisent une enzyme qui perce la paroi cellulaire. Ils injectent alors leur ADN qui reprogramme la bactérie pour produire de nouveaux virions. L'hôte explose sous la pression et ses agresseurs s'en vont traquer de nouvelles cibles en épargnant les cellules saines de l'organisme. Le cycle de contamination prend à peine vingt minutes et produit entre 100 et 300 nouveaux bactériophages. Quand ils n'ont plus rien à se mettre sous la dent, l'organisme les élimine naturellement. En deux à trois jours, l'affaire est bouclée.