ADRESSE AUX HUMAINS QUI REFUSENT DE DISPARAÎTRE

Publié le par Résistance verte

À toutes celles et ceux que la peur ne paralyse pas mais motive,
À toutes celles et ceux qui ont gardé la mémoire, savent l’histoire, cherchent la vérité,
À toutes celles et ceux qui ne sont pas épuisés, blasés, qui ont de la ressource,
À toutes celles et ceux qui veulent combattre l’oppression, qui veulent vivre libres et égaux,

Nous lançons cet appel :

Nous ne croyons pas les mensonges officiels - ficelés par le véreux « Conseil scientifique » - qui présentent le Covid-19 comme une pandémie si grave qu’elle exige des mesures scélérates installant une véritable dictature en France et ailleurs. La propagande en batterie que nous subissons quotidiennement a pour seule fonction de neutraliser notre révolte face à une guerre sociale impitoyable.

Le prétexte sanitaire permet de mener une politique d’asservissement général jamais observée, sous nos latitudes, depuis l’occupation nazie. Ce dispositif coercitif et répressif accompagne un effondrement économique provoqué car la crise du capitalisme était entrée en 2019 dans une impasse en feu, l’absence de croissance mondiale se combinant à l’éclatement d’insurrections sur tous les continents.

L’objectif de l’État macroniste, en accord avec les instances dirigeantes des principales puissances mondiales, est de tenter de donner quelques années de survie supplémentaire au capitalisme. En témoigne le discours du Premier Ministre Jean CASTEX à l’Université d’été du MEDEF. Il s’agit de restructurer le système économique sur le dos des travailleurs, en écrasant les salaires, en liquidant les droits sociaux et démocratiques, en jetant des millions d’entre nous dans le chômage et la misère.

Ce reformatage de la société, qui n’a aucune échéance visible, table sur la destruction de ce qui constitue le lien humain au profit d’une colonisation marchande achevée de l’ensemble des espaces et activités. Chaque attitude, lieu, moment, échappant encore à la valorisation capitaliste doit s’effacer ou se convertir à la marche barbare de la rentabilité. Le capitalisme fait la guerre à ce qui constitue notre humanité.

Dans ces conditions de mensonge généralisé, de dictature sanitaire, de crise violente du capitalisme, le souvenir de nos prédécesseurs qui résistaient activement face à l’oppression se ravive. Il nous convoque pour se lever et frapper la tyrannie d’un monde invivable dont seules les crapules capitalistes profitent.

La résistance commence par l’action individuelle, le refus de se soumettre à la discipline, le souhait de se solidariser, de se regrouper. Elle se poursuit par l’organisation entre exploités, opprimés, en dehors des instances chargées de domestiquer leur force, c’est-à-dire les partis politiques, les syndicats et autres ONG. Elle se réalise par la contre-information (incompatible avec les balivernes complotistes de l’extrême-droite), le sabotage, la grève, la manifestation et l’insurrection.

GARAP
Groupe d'Action pour la Recomposition de l'Autonomie Prolétarienne
Septembre 2020

https://garap.org/pdf/communiques/comm80-adresseauxhumains.pdf

 

 

DU BON USAGE DES ÉPIDÉMIES

Le délire hygiéniste au service de la recomposition autoritaire du capitalisme

I. CORONAVIRUS : PANDÉMIE MONDIALE OU ARNAQUE AU VIRUS ?

Un spectre hante l’Europe : le spectre du coronavirus. Toutes les puissances de la vieille Europe se sont unies en une Sainte-Alliance pour traquer ce spectre : le Vatican et la chancelière allemande, le président français autant que ses opposants « insoumis », les condés belges comme les militaires italiens.

Pourtant, à rebours du discours alarmiste hégémonique, le Covid-19 dont on nous rebat tant les oreilles se distingue surtout d’autres maladies infectieuses par sa nouveauté – et le caractère effrayant que cela lui confère : sa dangerosité extrême est donc, pour l’heure, surtout potentielle.

Pour le reste, et en l’état actuel des connaissances :
    •    À l’échelle planétaire, 18 000 personnes sont mortes en 100 jours depuis mi-décembre, à comparer avec les 2,6 millions de personnes mortes dans le monde par infection respiratoire aiguë en 2019 ;
    •    Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) elle-même, 80% des infections au coronavirus seraient bénignes voire asymptomatiques ;
    •    Les chiffres officiels font état, le 24 mars, de 22 300 « cas sévères » et de 1 100 morts en France, soit un taux de létalité de 4,93% « relativement bas », notamment par rapport au SRAS de 2003. Même si le nombre de morts n’est pas exhaustif, du fait notamment de la non-prise en compte des décès dans les EHPAD, ce taux est pourtant surévalué. En effet, justifiée officiellement par des raisons logistiques, la limitation des tests aux seules personnes présentant des symptômes graves permet d’afficher un taux de létalité d’autant plus menaçant qu’il est artificiellement biaisé – les personnes asymptomatiques ou présentant des symptômes bénins n’étant pas testées donc pas comptabilisées ;
    •    En France, selon le Directeur Général de la Santé Jérôme Salomon, 7% des personnes décédées ont moins de 65 ans. Cela signifie, implicitement, que 93% des personnes décédées ont plus de 65 ans, soit un pourcentage qui est exactement le même que lors de la dernière épidémie sévère de grippe en France (13 000 morts pendant l’hiver 2017-2018) ;
    •    Selon Geneviève Chêne, directrice générale de Santé Publique France, les personnes touchées par le coronavirus ont souvent une fragilité de santé antérieure… à l’instar, donc, de la grippe saisonnière – dont on nous parle pourtant très peu alors même qu’elle tue chaque année 250 000 à 500 000 personnes dans le monde ;
    •    En Italie, les victimes du coronavirus sont à 70% des hommes, avec une moyenne d’âge de 79 ans – ceci à mettre en perspective avec l’espérance de vie des hommes italiens, qui est justement de 79 ans ; selon les derniers chiffres de l’Institut Supérieur de la Santé (ISS), presque 99% (!) des personnes décédées présentaient au moins une autre pathologie : insuffisance cardiaque, diabète, insuffisance rénale chronique, etc.
    •    En Allemagne, qui compte plus de 16 600 cas de personnes infectées, le recours aux dépistages massifs et aux masques aboutit à un taux de létalité du coronavirus de… 0,3% (46 décès) ;
    •    Il ressort d’une étude publiée dans la revue médicale américaine Jama, portant sur 45 000 personnes atteintes du Covid-19, que le taux de létalité est surtout élevé chez les personnes âgées (8% dans la tranche d’âge 70-79 ans), mais qu’il est de 1,3% chez les quinquagénaires, 0,4% chez les quadragénaires, 0,2% chez les moins de 39 ans et 0% chez les enfants ;
    •    Alors même que les merdias franchouillards nous resservent ad nauseam le storytelling de l’hôpital-public-héroïque-mais-débordé-par-l-afflux-des-cas-de-coronavirus, les cliniques privées n’ont toujours pas été officiellement réquisitionnées ; cerise sur le gâteau de cette situation surréaliste, c’est Lamine Gharbi, président de la Fédération des cliniques et hôpitaux privés de France, qui exhorte le gouvernement à réquisitionner les structures privées : « Aujourd’hui malheureusement, alors que les capacités publiques sont dépassées, les établissements privés restent sous-utilisés. Un grand nombre de nos lits qui ont été libérés restent vides. Dans le Grand Est, nous avons libéré 70 places de réanimation qui n’ont pas encore été totalement affectées ce samedi par l’Agence Régionale de Santé où les hôpitaux publics sont débordés. Pourtant, des patients sont transportés en avion dans le sud de la France. Je demande donc solennellement à ce que nous soyons réquisitionnés pour épauler l’hôpital public » ;
    •    Enfin, en dépit du scepticisme intéressé des médias mais aussi du gouvernement français (ni les premiers ni le second ne souhaitant apparemment que cet épisode de Covid-19 se termine prématurément par un happy end), un remède existerait déjà (et un vaccin serait en phase de test).

En réalité, tout porte à croire que, derrière les faux semblants, la racaille politicienne a bien conscience du caractère a priori commun de cette maladie infectieuse :
    •    Le ministre de l’Éducation nationale J.-M. Blanquer a admis dans la plus grande des décontractions que le coronavirus touchera vraisemblablement plus de la moitié de la population française – preuve s’il en était de sa relative innocuité dans sa forme actuelle ;
    •    L’Assemblée nationale elle-même constitue un des clusters majeurs à partir duquel le Covid-19 se dissémine sur le territoire hexagonal; or, on peut éventuellement le déplorer mais force est cependant de constater qu’aucun député n’est actuellement à l’article de la mort… ce qui n’a cependant pas empêché le Conducător de pacotille Macron d’évoquer dans son discours exalté du 16 mars 2020 « la plus grave crise sanitaire qu’ait connue la France depuis un siècle ».
En outre, le Covid-19 s’est d’autant plus facilement diffusé en France que les marcheurs au pas de l’oie ont fait tout le nécessaire en ce sens :
    •    Le 24 janvier 2020, Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé, estimait que « le risque de propagation du coronavirus dans la population » française était « très faible »… or, quelques jours après cette déclaration, A. Buzyn avertissait le Premier ministre E. Philippe de la possible collision calendaire entre le pic de l’épidémie du Covid-19 et les élections municipales ;
    •    Le 6 mars 2020, Emmanuel et Brigitte Macron assistaient à une représentation au théâtre « pour inciter les Français à sortir malgré le coronavirus » ;
    •    Le 9 mars 2020, la porte-parole de La Répression En Marche Aurore Bergé tenait un discours à tonalité on ne peut plus rassurante, affirmant que la France était « extrêmement préparée à ce type de risque sanitaire, avec des médecins de ville formés là-dessus » ;
    •    Enfin, alors que l’épidémie a été circonscrite à Taïwan et en Corée du Sud grâce à la généralisation des dépistages et du port du masque, le gouvernement LREM a refusé le recours à ces méthodes pourtant éprouvées et a préféré opté pour l’encagement (prononcer : « confinement », ça fait moins peur !) généralisé de 67 millions de personnes. Sur le plan sanitaire, les exemples taïwanais et sud-coréen prouvent en tout cas que le confinement n’est pas la seule option pour vaincre le coronavirus.

Soit dit en passant, rien ne démontre que, s’agissant des publics fragilisés (détenus embastillés dans les geôles de la raie publique française, personnes âgées résidentes en EHPAD, mineurs dépendants de l’Aide Sociale à l’Enfance, femmes victimes de violences conjugales, etc.), le confinement généralisé sauvera plus de vies qu’il ne générera de dégâts humains (suicides et dépressions liés à l’interdiction des visites, contagion généralisée générée par la promiscuité, etc.).
L’on ne saurait clore ce point sans évoquer le sempiternel rôle d’idiots utiles joué par les organisations politiques de gauche (au sens large). Rompues à la « fabrication de faux combats pour le présent et si vaillant[es] à pousser tout ce qui [est] déjà en train de tomber) », ces dernières focalisent leurs critiques sur l’insuffisance – certes indéniable – des moyens dont dispose le système public de santé pour faire face à l’épidémie – demandant même, tels O. Faure (PS), J.-L. Mélenchon (LFI), J. Bayou (EELV) et F. Roussel (PCF), à La Répression En Marche de restreindre encore plus fortement les libertés publiques et individuelles ! Assurément, l’application incessante de réformes austéritaires à la fonction publique hospitalière, explicitement endossée par Macron en personne en avril 2018, a nécessairement contribué à dégrader la qualité d’un système de santé naguère considéré par l’OMS comme le plus performant du monde. Toutefois, en optant pour ce seul axe de lecture de l’actuelle crise, sociaux-démocrates, staliniens et autres altermondialistes avariés viennent totalement valider le discours trompeur présentant – en dépit des données disponibles – le Covid-19 comme une « menace sans précédent ». Car si, comme l’affirme avec gravité Mediapart, les « services de réanimation se préparent à trier les patients », on ne saurait néanmoins oublier que – conséquence de l’état de délabrement organisé du système de santé – l’hôpital public a manqué de lits de réanimation avant l’actuelle crise sanitaire, c’est-à-dire dès l’épidémie de grippe de 2017-2018 précédemment mentionnée.

La gestion à flux tendu, appliquée aux hôpitaux de la même manière qu’aux chaînes de supermarché ou aux concessionnaires automobiles, ou à la fabrication des masques chirurgicaux, a pour conséquence une absence de stocks (en l’occurrence de lits et de matériel médical) permettant de faire face à des périls inconnus : elle est absolument incompatible avec la floraison de catastrophes écologiques et sanitaires que ce système produit. Le moindre imprévu se traduit donc par des milliers de victimes parfaitement évitables qui, faute d’une réserve de lits disponibles, passent directement de l’hôpital à la morgue. Ce n’est donc pas la dangerosité particulière de ce virus que cette hécatombe annoncée démontre mais la morbidité d’un système qui a fait de la non-reproduction de la vie et du pillage sa raison d’être. Ce n’est pas non plus l’incompétence des gouvernants ou leur « impréparation » que cette crise révèle mais leur fonction de bons gestionnaires du capital.

En conséquence, les belles âmes citoyennistes qui popularisent le slogan « Restez chez vous ! », s’ils croient ainsi rendre service aux personnels soignants qui craignent – très légitimement – de devoir faire face à un afflux ingérable de patients dans les semaines qui viennent, se font surtout les complices d’une expérimentation totalitaire sans précédent dans ses modalités (l’assignation à résidence – par simple décision administrative et sous peine de sanctions – de centaines de millions de personnes) comme dans son ampleur (plusieurs pays concernés).
Et qu’il faille, dans le système hospitalier de la sixième puissance économique mondiale, hiérarchiser entre les patients à sauver et ceux à abandonner à leur sort sonne comme une condamnation sans appel du mode de production capitaliste qui rend cette aberration possible… et non pas – n’en déplaise aux diverses chapelles de gauche – comme un appel à rétablir urgemment un État-providence fantasmé qui ne reviendra de toute façon jamais, si ce n’est sous la forme d’une farce.

II. PROVOQUER LA CRISE PLUTÔT QUE LA SUBIR :
QUAND DES GOUVERNANTS RADICALISÉS SE CONVERTISSENT
AUX THÈSES DÉCROISSANTES
ET PRATIQUENT LE SABOTAGE ÉCONOMIQUE

Alors, de quoi cette hallucination collective autour du Covid-19 est-elle le nom si, par rapport à ce que nous en savons actuellement, celui-ci n’a rien de particulièrement grave per se ? Avant tout, elle est le reflet de la peur panique de certaines bourgeoisies face à l’état de l’économie mondiale. Rappelons, à toutes fins utiles, ces quelques éléments factuels antérieurs à la « crise du coronavirus » :
    •    L’Allemagne, première puissance économique de l’Union Européenne et troisième exportateur mondial, a échappé de justesse à la récession au troisième trimestre 2019 ; sur l’année entière, la croissance de l’Allemagne est de seulement 0,5%, et sa production d’automobile est retombé à son niveau de 1997 ;
    •    Estimée à 2,3% en 2017, la croissance française n’a été que de 1,7% en 2018 et 1,2% en 2019. Au dernier trimestre 2019, la production de richesses s’est contractée de 0,1% et la dette publique représentait 99% du produit intérieur brut ;
    •    L’économie de l’Italie – troisième puissance économique de la zone euro et huitième mondiale – est à l’arrêt : elle a connu une récession fin 2018, puis une croissance de seulement 0,2% du PIB en 2019 incluant un quatrième trimestre durant lequel la production a reculé de 0,3% ; la dette publique italienne représente 132% de son PIB ;
    •    Au troisième trimestre 2019, l’économie de la Chine – deuxième puissance mondiale – a connu son plus mauvais taux de croissance depuis 27 ans (1992) ;
    •    Troisième économie mondiale, le Japon a connu, au dernier trimestre 2019, la pire chute de son PIB en cinq ans et, sur l’ensemble de l’année, la richesse produite n’a cru que de 0,7% ; sa dette publique représente 238% de son PIB ;
    •    Si elle connaît un cycle de croissance d’une longueur historique, l’économie américaine a cependant été marquée par une hausse de la richesse produite en 2019 (2,3%) en recul sensible par rapport à 2018 (2,9%) ;
    •    Dès décembre 2019, relayant notamment les craintes de l’OCDE, les rubriques « éco » des médias tenaient ce genre de propos : « L’OCDE prévoit que la croissance mondiale plafonne l’an prochain à 2,9%, son plus bas niveau depuis la récession mondiale de 2009 […] Une lente asphyxie de la croissance mondiale, sous l’effet de la numérisation et du changement climatique, au risque d’attiser les colères sociales : c’est ce que redoutent les économistes pour 2020 […] à plus longue échéance, l’économie mondialisée n’arrive pas seulement à la fin d’un cycle, mais approche la fin d’une ère, celle de l’envolée des échanges marchands et de l’industrialisation à grande vitesse des pays émergents […] Ludovic Subran, économiste en chef du géant de l’assurance Allianz, entrevoit un “purgatoire de croissance” mondial. S’il y en a un, “le prochain choc systémique ne naîtra sans doute pas dans la finance, mais sera exogène”. »

Ce sombre tableau n’a rien d’étonnant : pour sortir de la gigantesque crise financière puis économique débutée en 2008, les banques centrales ont réanimé le capitalisme en train de se noyer… en lui faisant boire encore plus d’eau – c’est-à-dire en stimulant le crédit par des politiques monétaires résolument expansionnistes. Si ces dernières ont permis à la bourgeoisie de s’acheter une décennie de sursis, ce fut au prix d’une hausse constante de l’endettement public et privé (ménages, entreprises) et d’une réduction corrélative de ses marges de manœuvre lorsque surviendrait tôt ou tard un choc endogène ou exogène majeur.

La classe dominante se trouvait, dès lors, face à un insoluble dilemme. Qu’on en juge : plus longtemps les politiques monétaires accommodantes permettraient le maintien de millions d’entreprises zombies et du pouvoir d’achat des ménages, et plus violent serait l’atterrissage économique lors de la prochaine crise.

Le choc économique s’annonçant donc d’autant plus rude qu’il serait artificiellement différé, certains gouvernants adeptes de la stratégie du choc ont tenté un coup de poker inédit, révolutionnaire à bien des égards : prendre prétexte du Covid-19 pour faire naître la crise économique par césarienne, plutôt que d’attendre passivement sa venue au monde. Le coronavirus fit ainsi office de deus ex machina. Et le confinement fut, lui, l’instrument permettant cette tentative de reboot du mode de production capitaliste, aussi audacieuse dans son principe qu’incertaine quant à ses résultats.

III. DÉROUTES POLITIQUES NATIONALES,
IMPASSE ÉCONOMIQUE GLOBALE, PROJET EUROPÉISTE MENACÉ :
LA BOURGEOISIE N’OFFRE POUR SEULE PERSPECTIVE
QUE SON TALON DE FER

En 2009-2010, la grippe H1N1 toucha au moins 10% des habitants de la planète, pour un macabre bilan compris entre 150 000 et 575 000 morts. Le problème sanitaire ne fût pourtant pas réglé en séquestrant un quart de l’humanité sous couvert d’enrayer la propagation de l’épidémie. Quid de 2020, alors ? Un individu, un groupe de personnes, a-t-il réellement eu l’idée folle de mettre le capitalisme à l’arrêt sur la base de simples décisions administratives, d’assigner 1,7 milliard de personnes à résidence, de transformer des pays entiers en prisons à ciel ouvert ? Est-ce l’œuvre d’un obscur dircab dans un ministère à Paris ou Rome, d’un stalino-capitaliste anonyme perdu dans les méandres de la bureaucratie chinoise, d’un commissaire européen un peu trop zélé, d’un retors think tank patronal ? Ou bien, sous l’effet de lois structurelles impersonnelles, cette solution s’est-elle imposée à certains gouvernements comme une évidence, sans même qu’ils aient conscience d’opérer un choix ? S’il faudra un jour dresser la généalogie de ces coups d’État sanitaires en chaîne, nous ne pouvons en l’état livrer, sur ce point, que les quelques commentaires ci-dessous.

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À l’image de toutes les dictatures léninistes fondées sur la fable du « centralisme démocratique », la République Populaire de Chine (RPC) a pour habitude de gérer les masses – dont elle se méfie instinctivement, et pour cause – par la coercition. Ce mode de gouvernement étant dans l’ADN même de la bureaucratie maoïste, il est logique que, dans la province la plus touchée par le coronavirus, la solution du confinement total ait été retenue alors même que d’autres solutions existent pour résorber ce type d’épidémie (cf. supra).

Mais, alors que l’économie de la RPC a déjà redémarré après la crise du coronavirus et qu’une croissance de 3% est anticipée cette année, la bureaucratie chinoise n’avait sans doute pas anticipé pareil plagiat de ses méthodes expéditives par des régimes démocratiques bourgeois : elle semble n’avoir rien à y gagner à court terme, car son modèle économique résolument tourné vers l’exportation pâtira nécessairement de l’emprisonnement de 1,7 milliard de consommateurs potentiels. Et, ce, d’autant plus que la demande intérieure chinoise n’est pas apte à prendre le relais.

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Dans notre univers orwellien, pas étonnant que la Chine serve désormais de modèle à l’ensemble du « monde libre ». À l’heure de la traçabilité intégrale des « citoyens », du dépistage des moindres faits et gestes de tout un chacun, de la généralisation de la reconnaissance faciale, vocale, digitale, thermique…, de la vidéo-surveillance et de la géolocalisation, de la diffusion de gadgets comme les applis ou les objets connectés qui aboutissent à confier aux surveillés eux-mêmes le soin de fournir des informations à la police (belle victoire de l’« autogestion »), le monde de télécrans et de patrouilles volantes (aujourd’hui ce sont des drones) décrit par George Orwell dans 1984 n’est plus une fiction mais une réalité, une réalité qui, à bien des égards, est bien plus poussée que le modèle décrit dans le roman.

L’Italie est le premier pays après la Chine à avoir recouru au confinement. Non issu du suffrage universel, né d’une vulgaire révolution de palais qui a renvoyé les sous-fascistes de la Ligue dans l’opposition en septembre 2019, le gouvernement actuel est composé du PD (centre-gauche) et des « populistes » du Mouvement 5 Étoiles (M5S)… Cette coalition aussi baroque qu’impopulaire est nécessairement instable car regroupant un parti à prétention « antisystème » et un parti incarnant ledit Système jusqu’à la caricature. A-t-elle, prévoyant les dégâts potentiels que pourrait faire le Covid-19 dans un pays aussi vieillissant que son système de santé, choisi l’option du confinement dans le seul but de se dédouaner en cas de crise sanitaire ? Il est vrai que l’encagement généralisé de la population ressemblait a priori pour le gouvernement à un jeu à « pile, je gagne, face, tu perds » :
    •    soit le confinement permet de stopper l’épidémie, auquel cas il aura démontré a posteriori tant son utilité que son efficacité ;
    •    soit le bilan humain est élevé, ce qui confirme a minima que les discours sur la « dangerosité extrême » du coronavirus ne sont pas que pure propagande.

Avec 4 800 morts, dont 800 pour la seule journée du 21 mars, le confinement n’a pas encore fait la preuve de son efficacité sur le plan médical. Mais il aura au moins trouvé un fervent adepte en la personne de Matteo Salvini : le dirigeant de la Ligue soutient non seulement le principe du confinement mais il reproche, en outre, au gouvernement (qu’il juge trop laxiste) de ne pas l’appliquer dans une version plus « chinoise »… Comme quoi, entre fils spirituels du Duce et descendants du Grand Timonier, il y a quand même moyen de moyenner !

Remède à la dégénérescence du mode de production capitaliste, le confinement présente, comme tout médicament, ses effets secondaires indésirables. En insistant sur la menace sanitaire grave que constituerait le coronavirus et en décrétant le recours au télétravail, le gouvernement Conte n’avait pas anticipé la réaction de certains cols bleus : car, si le Covid-19 est dangereux pour les employés des bureaux et des administrations, priés de rester chez eux, alors, en toute cohérence, il doit l’être aussi pour eux. D’abord spontanées, ensuite reprises par les bureaucraties syndicales, des grèves éclatèrent dans de nombreux secteurs pour réclamer une extension du confinement aux entreprises non vitales. Se heurtant à ces fractions du prolétariat industriel défendant le principe du confinement de manière plus conséquente qu’eux, la coalition gouvernementale et le patronat durent céder partiellement. Les confineurs, ces cons finis, se trouvent pris à leur propre piège.

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Le 6 mars dernier, E. Macron n’avait pas encore réalisé les bénéfices politiques putatifs qu’il pourrait escompter d’un encagement généralisé des 67 millions d’habitants de l’Hexagone. À cette date, il avait encore l’honnêteté de comparer le coronavirus à une épidémie de grippe, et il affirmait : « Il faut pouvoir tenir. Si on prend des mesures qui sont très contraignantes, ce n’est pas tenable dans la durée. » Entouré de médiocres mais esprit vif, le nabot de l’Élysée est souple jusqu’à l’excès sur le plan des idées. Ceci fait de lui un traître invétéré, mais probablement aussi un individu capable de penser out of the box. N’a-t-il pas intitulé son ouvrage programmatique Révolution ? Déjà massivement considéré comme un dictateur en raison de la répression violente des mouvements des Gilets Jaunes puis contre la « réforme » des retraites et de plusieurs crimes policiers impunis (pléonasme), lui restait-il encore quelque chose à perdre en s’engageant dans une politique de la table rase assurément « disruptive » ?

Car Macron a, certes, réussi à faire avancer à pas de géant l’agenda patronal depuis son élection, menant avec succès une offensive de classe assumée contre les salariés du secteur privé (ordonnances Macron du 22 septembre 2017), ceux de la SNCF (fin du statut des cheminots par la loi du 27 juin 2018 « pour un nouveau pacte ferroviaire ») et ceux de l’État (loi du 6 août 2019 « de transformation de la fonction publique »), ainsi que contre les chômeurs (décret du 26 juillet 2019). Mais cette blitzkrieg victorieuse ne fut réalisée qu’au prix d’une impopularité record et d’un accroissement des antagonismes de classe d’autant plus dangereux pour les dominants que la colère populaire a pris, à l’occasion du mouvement des Gilets Jaunes, des formes que les polices syndicales et partidaires n’ont pas réussi à canaliser – les GJ allant même porter le fer directement dans les quartiers de l’Ennemi.

La lutte de classes ayant trouvé sa traduction – de manière évidemment déformée – sur le terrain électoral, le premier tour des élections municipales a révélé le degré de discrédit non seulement de la majorité présidentielle (12,5% des voix à l’échelle nationale) plombée par ses « réformes structurelles » et d’incessantes « affaires » (Benalla, Ferrand, Delevoye, etc.) mais également – ce qui est peut-être plus inquiétant encore pour la bourgeoisie – de sa fausse opposition spectaculaire : les fafs du RN, dont les listes peinent à atteindre 2,5% des voix. Le peuple ayant trahi, à de multiples reprises, la confiance des autorités, n’était-il pas tentant, dès lors, de le dissoudre (B. Brecht) ? Inspiré peut-être par les méthodes de l’autocrate turc Erdogan, Macron décida donc, en même temps que le confinement, du report du second tour du scrutin.

Depuis les annonces présidentielles du 16 mars, le gouvernement marche sur une ligne de crête très inconfortable : d’un côté, assumer sa politique d’enfermement généralisé des masses et, de l’autre, garantir au maximum la continuité du travail et de l’activité productive. Si l’isolement chez eux des employés, des enseignants, des cadres… permet un développement sans précédent du télétravail en transportant l’exploitation à domicile et en renforçant l’atomisation des individus, ce nec plus ultra de l’aliénation marchande n’est cependant pas applicable à la totalité des professions. S’ensuit une querelle interminable sur la définition des secteurs et des activités « non indispensables », essentiels ou non essentiels, le gouvernement cherchant au départ, comme en Italie, à faire valoir une définition extensive de ceux-ci et ne cédant, dans une certaine mesure, que dans un second temps. Il est en effet indispensable de maintenir en fonctionnement – contre la volonté des travailleurs concernés – certaines strates de l’appareil productif et de la machine d’État afin que soient garantis a minima les besoins physiologiques et de sécurité de la population. Dans le cas contraire, rien ne garantit que la peur de la « pandémie de coronavirus » suffirait à maintenir le troupeau sagement confiné. Or, en cas de pillages et de violences, les néo-décroissants d’En Marche risqueraient de perdre l’initiative et, par la même occasion, leur audacieux pari.

Difficile à anticiper car sans précédent, l’enfermement de pays entiers en temps de paix apparaît rétrospectivement en France – berceau de la guerre contre-révolutionnaire – comme s’inscrivant dans le droit fil de moults reculs des libertés publiques et individuelles… En réalité même, un véritable fil d’Ariane qui mène du déclenchement du « plan Vigipirate » (1995) au confinement (2020) en passant par la proclamation de l’état d’urgence (2005, 2015), son intégration dans le droit commun (2017), la loi « anticasseurs » (2019), celle sur la sécurité quotidienne (2001) ou encore celle sur les « violences en bande » (2010), sans oublier évidemment la carte blanche accordée à une police sadique massivement acquise aux idées du RN. Mais cette volonté des marcheurs au pas de l’oie de mettre l’Histoire en pause et la lutte des classes sous le boisseau paraît illusoire : quand un gouvernement ultra-minoritaire se réclamant d’un parti fantôme ne tient que par ses soudards, quand c’est toute la société qui in fine est traitée en ennemie, alors la subversion peut également surgir de partout.

***

Ce lock-out international s’annonce d’ores et déjà comme ayant des conséquences économiques majeures, notamment sur l’Union Européenne :
    •    Selon Bruno Le Maire, la France sera en récession à hauteur de 1% cette année, soit un niveau de production situé 2,3 points en-deçà des prévisions initiales ;
    •    Le CAC 40 a perdu 39% de sa valeur en un mois ;
    •    La récession en Allemagne (qui a la Chine et la France respectivement pour 1er et 4ème partenaires commerciaux) pourrait atteindre 9% cette année ;
    •    Tant la BCE que la Commission Européenne s’attendent à une récession considérable dans l’UE ;
    •    Selon l’estimation, la plus basse, la présente crise économique détruira 5,3 millions d’emplois dans le monde.

En France, la réponse qui se dessine à cet effondrement provoqué inclut des mesures d’austérité, une politique massive de socialisation des pertes des entreprises connue sous le nom – cher à une certaine gauche & à une certaine droite (LFI, DLF, dinosaures gaullistes, débris chevènementistes) – de « nationalisations », un plan de soutien aux entreprises de 45 milliards d’euros et des garanties bancaires à hauteur de 300 milliards d’euros. Ces mesures, qui ne manqueront pas de faire exploser le déficit et la dette publics, s’accompagnent d’injonctions moralisatrices du Premier ministre à « tous devoir, collectivement, faire un effort considérable pour permettre à notre pays de repartir. » En vertu de quoi les premiers « efforts » sont déjà demandés au prolétariat : ils se traduisent, dans la « loi instaurant un état d’urgence sanitaire » prestement votée par le parlement, par une limitation des congés payés et du repos hebdomadaire.

Victimes d’un odieux chantage à la santé publique (au choix : « Restez chez vous ! Sauvez des vies ! » ou bien « Rejoignez la grande armée de l’agriculture française ! »), les prolétaires réquisitionnés de facto sont priés de trimer en silence tandis que ceux désormais jugés surnuméraires doivent avoir le bon goût de rester calfeutrés chez eux. Et si les tentatives de culpabilisation venues du plus haut niveau de l’État et fondées sur ce nouvel ordre hygiéniste délirant ne suffisaient pas, les dominants ont aussi prévu le bâton – et même plutôt deux fois qu’une.

Au pays de Molière et de Pétain, en l’espace d’une semaine, l’amende pour non-respect du confinement est passée de 38 euros à 150 euros, de téméraires « évadés » ont été placés en GAV au motif hautement fantaisiste de « mise en danger de la vie d’autrui » puis, dans la foulée, la commission de l’infraction en état de récidive est devenue passible de six mois de prison, 3 750 euros d’amende et de TIG. Sur les seuls six premiers jours d’encagement généralisé, ce sont plus de 90 000 (!) amendes qui ont été infligées (les temps s’annoncent durs pour les finances publiques, il n’y a donc pas de petits profits !). Se croyant revenu en 1942, le préfet de police de Paris Didier Lallement (sic) paraît tout bonnement inarrêtable, enchaînant déclarations martiales et surenchère liberticide. Raccords avec leur chef, des flics parisiens ont même eu la riche idée de coller des prunes à des sans-logis pour non-respect du confinement. À Nice, ville tenue par Les Républicains, c’est un drone qui vole dans les airs et intime l’ordre aux fuyards de retourner s’auto-emprisonner. À Béziers, le maire facho n’aurait pour rien au monde raté l’occasion d’imposer le couvre-feu. Dans ce climat joyeux de chasse aux pauvres et aux prolos – voire de chasse à l’homme tout court – le député LR Éric Ciotti et la députée RN Marine Le Pen trouvent quand même le moyen de prôner la mise en place de mesures plus liberticides… Pourquoi pas, par exemple, un suicide collectif de tous les députés français, eux deux inclus, au nom du principe de précaution, puisqu’il est désormais avéré que le coronavirus se diffuse notamment depuis l’Assemblée nationale dans laquelle ils siègent ?
De l’autre côté des Alpes, des drones sont également utilisés et les forces de l’ordre procèdent à 200 000 contrôles quotidiens. En outre, être plus de trois personnes sera considéré comme un rassemblement et passible d’une amende de 5 000 euros.

En Espagne, le non-respect de l’« état d’alerte » qui a été décrété peut entraîner des sanctions s’échelonnant entre 100 euros d’amende et un an d’emprisonnement. Pour la seule journée du 17 mars, les polices madrilènes et catalanes ont infligé plus de 800 contraventions.
Enfin, outre-Quiévrain, les auteurs de déplacements jugés non essentiels encourent jusqu’à 4 000 euros d’amende et/ou trois mois de prison. À Ans – commune située en Belgique et non en République islamique d’Iran… on pourrait s’y méprendre ! – « la police traque désormais les citoyens qui se donnent des bisous dans les lieux publics ». Les contrevenants risquent 250 euros d’amende… ce qui vaut mieux que les coups de fouet ou la lapidation, mais ne laisse pas d’interroger : à quand des « perquisitions sanitaires » de la maréchaussée pour s’assurer de l’absence de rapports sexuels au domicile de tous ces gueux porteurs potentiels du Covid-19, du VIH, de la chtouille et de tatouages de mauvais goût ?

Moins amusant qu’une histoire belge, la suite de ce lock-out généralisé comporte encore de nombreuses incertitudes. À notre sens, quelques développements à l’échelle mondiale, continentale et nationale paraissent prévisibles mais certaines questions demeurent :
    •    Alors que nombre de pays se rallient, fut-ce au prix de tensions internes, à la logique d’emprisonnement de leur population – ce qui revient donc à saboter toute perspective de croissance économique pour 2020 au moins – d’autres semblent hésiter (Grande-Bretagne, États-Unis, Pays-Bas, Russie) à s’engager dans cette voie… Pour combien de temps encore, sachant que, eu égard au caractère internationalisé des chaînes de valeur, le confinement appliqué ailleurs aura forcément des répercussions sur leurs économies nationales ? Dans un monde globalisé, le marasme économique ne s’arrêtera pas aux frontières des États et les gouvernements réfractaires seront amenés à reconsidérer leur position. Faute de quoi ils écoperont rapidement des inconvénients du confinement (la récession) sans pour autant bénéficier de ses précieux avantages en matière de restrictions des libertés politiques (bien utiles pour verrouiller toute velléité de résistance prolétarienne en temps de crise). À l’instar du virus qui lui fournit une justification, le confinement sera donc contagieux… reste à déterminer dans quelle mesure.
    •    Dans le cadre d’une récession généralisée à toutes les économies phares de l’UE, une seconde crise de la dette en l’espace d’une décennie paraît inéluctable car les facteurs ayant déclenché la première crise sont toujours présents (niveau élevé des dettes publiques nationales, absence de solidarité économique et politique entre États de la zone, faible coordination des politiques budgétaires…). S’il est attaqué par les marchés financiers, l’euro pourra-t-il survivre autrement que par le biais d’une généralisation des « sauvetages à la chypriote » – les pays de la zone devant, pour faire passer pareille amère potion auprès de populations lessivées par dix ans d’austérité, se débarrasser des ultimes oripeaux de la démocratie bourgeoise ?

Pour le reste, des points ont incontestablement été marqués par les gouvernants qui ont enfanté cet absurde Pandémonium aux caractéristiques si (d)étonnantes qu’elles ont généré un effet de sidération des masses :
    •    Il emprunte, en les perfectionnant au moyen des technologies modernes, des éléments aux fascismes brun et rouge – ce qui aboutit à un degré de contrôle de la sphère publique, privée et intime dont même le petit moustachu géorgien aurait été jaloux ;
    •    Le chantage infantilisant à la santé publique (« Restez chez vous, vous sauverez des vies ! », « Pensez à bien à applaudir les soignants tous les soirs à 20h ! » et même « Rasez-vous pour lutter contre le coronavirus » !) mise sur l’essor des réflexes citoyennistes et sur la propension rarement démentie des couches petites-bourgeoises à se vautrer dans toutes les impasses politiques que le spectacle fabrique à leur usage (« Nous sommes tous Américains » après le 11 Septembre 2001, « Votez Chirac » en 2002, « Je suis Charlie » en 2015, sans même parler des « Free Tibet » et autres « Libérez Aung San Suu Kyi ») ;
    •    Alors que le droit à la paresse & le refus de travailler font partie des mots d’ordre historiques du camp de la subversion depuis Paul Lafargue jusqu’à l’IS, les gouvernants vont désormais jusqu’à dispenser autoritairement de turbin des centaines de millions de salariés des secteurs jugés non essentiels, pour les besoins de leur crash test économique en conditions réelles ;
    •    Big up également aux décroissants qui, au regard de la progression fulgurante de leur idéologie en l’espace d’une semaine, n’auront plus besoin de se les peler à vendre leur presse sur les marchés en plein hiver.

Les provocations verbales de la défunte ordure Thatcher (« There is no such thing as “society” ») s’accordent bien aux présentes réalités : momentanément, la société n’existe plus et les exploités sont au repos forcé – cloîtrés chez eux, sur ordre itératif des gouvernants. Mais, contrairement à la Deuxième guerre mondiale – qui avait détruit massivement les moyens de production et la force de travail, préparant le terrain aux « Trente Glorieuses » – les problèmes économiques demeurent car le capital constant est toujours là, tout autant que le prolétariat. Victoire tactique probante de la bourgeoisie sur le plan politique, le confinement généralisé ne règle rien sur le terrain de l’économie.

***

1929, 1973, 1987, 2008, 2020… les crises du mode de production capitaliste se succèdent et contribuent à chaque fois à remodeler les formes de la domination de classe. La Grande Dépression déboucha sur le nazisme en Allemagne et fut réglée par la seconde boucherie mondiale. Les crises des années 70-80 fournirent le carburant idéologique nécessaire à l’essor de la révolution néolibérale au détriment du paradigme keynésien quasi-hégémonique depuis la Libération. Enfin, la bourgeoisie ne s’extirpa de 2008 qu’au prix d’une victoire à la Pyrrhus, le gonflement délibéré des niveaux d’endettement rendant inévitable un prochain cataclysme économique (cf. supra).

Que sortira-t-il de 2020 ? La difficulté pour les exploiteurs réside notamment dans l’absence totale de récits mobilisateurs à refourguer aux masses. Là où le nazisme (la conquête de l’espace vital, la supériorité de l’Aryen, le Reich de 1000 ans…), le bolchevisme (la construction du paradis socialiste, l’homme nouveau ou, plus prosaïquement, l’accès à la propriété des terres pour la petite paysannerie…) ou les juntes latino-américaines (l’entrée dans la société de consommation, l’ascension sociale vers la « classe moyenne ») assortissaient la mise en coupe réglée de la société de promesses susceptibles d’entrer en résonance avec la psychologie des masses, la domination de classe échoue aujourd’hui à s’appuyer sur un quelconque « grand projet » capable de mystifier durablement les populations et de faciliter la paix sociale. Disparue la carotte, ne reste plus que le bâton.

En France, l’enfermement généralisé des masses sera probablement durci et prolongé. À en croire les sondages officiels, plus de 4 personnes sur 10 font (encore) confiance au gouvernement pour gérer la crise. Mais la seule question qui vaille est : combien seront-ils bientôt à avoir compris que le gouvernement a créé la crise ?

Sans base sociale digne de ce nom dans le pays, le gouvernement LREM doit, lui aussi, réfléchir en ce moment à cette épineuse question. Peut-être escompte-t-il que le régime d’exception permanent lui permettra de tenir le pays sous sa coupe jusqu’en 2022. Si, comme l’affirme un intellectuel libéral, ancienne « plume » de Christine Lagarde, « la gestion d’une épidémie n’est pas une simple affaire médicale. Elle est le reflet, et bien souvent le vecteur, d’un projet politique », alors nul besoin d’être un génie pour pouvoir déduire de la gestion du coronavirus par LREM la nature dictatoriale de son projet politique. Mais cette passion rance pour le confinement ne confinera pas longtemps les passions en France. L’Histoire a déjà cloué ce gouvernement vandale et la classe dont il sert les intérêts à un pilori éternel. Au prolétariat, désormais, de finir le travail.

GARAP Mars 2020.

https://garap.org/communiques/communique77.php https://garap.org/pdf/communiques/comm77-dubonusagedesepidemies.pdf

 

Publié dans Coronavirus, Environnement

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