DISPARITION DES INSECTES

Publié le par Résistance verte

Des scientifiques lancent un « coup de clairon » sur la disparition des insectes.

L’Académie des sciences américaine a publié discrètement le lundi 15 octobre un rapport qui insiste sur l’inquiétante, et de plus en plus rapide, disparition de la plupart des espèces d’insectes. En s’intéressant à la situation aux États-Unis, où les spécialistes et le public ne prêtaient pas une grande attention à ce phénomène, mais également dans le monde entier. Notamment en Allemagne où une étude a révélé, il y a quelques semaines, qu’au cours des vingt dernières années la décroissance du nombre et de la quantité des espèces disparues atteignait 76 % dans les espaces naturels préservés. Un expert de ces questions, David Wagner, chercheur à l’université du Connecticut, qui n’a pas participé à la rédaction de ce rapport, le commente avec effroi :

Cette étude est un véritable coup de clairon qui doit nous réveiller. D’autant plus que ces disparitions constatées aux États-Unis et en Europe pourraient être encore plus importantes dans le reste du monde. Cet article est l’un des plus dérangeants que j’aie jamais lu. D’autant plus que les auteurs attribuent en grande partie ces disparitions aux changements climatiques.

MOINS D'INSECTES, MOINS D'OISEAUX

Bradford Lister, chercheur à l’Institut polytechnique de New York, qui étudie les insectes de la forêt humide de Porto Rico depuis les années 1970, confirme ces craintes ; après avoir constaté, par exemple, que tous les papillons avaient disparu d’une forêt, El Yunque, une zone protégée depuis les années 1930. Une situation qui explique également la raréfaction des oiseaux. Les insectivores mais aussi la plupart des autres qui contribuaient à la biodiversité de cet espace forestier. Ce constat résulte de son travail sur place qui révèle que les quantités d’insectes piégés ont été divisées par 4 ou 8 depuis ses premières expériences en 1976 :

Toutes les espèces s’effondrent, non seulement les papillons mais aussi les sauterelles, les araignées, pas une seule n’échappe à cette catastrophe. Dans des proportions qui tournent autour de 60 % et qui permettent de comprendre pourquoi la présence des oiseaux a chuté d’en moyenne 50 %, avec un record de 90 % pour certains comme le merle vert de Puerto Rico, une espèce endémique.

UNE SITUATION CATASTROPHIQUE

Pour les scientifiques associés dans ce travail d’avertissement, la gravité de la situation des insectes est sous-estimée et leurs constatations, basées sur les recherches des auteurs et sur la lecture d’autres (trop rares) études publiées dans le monde sont annoncées comme effrayantes par les rapporteurs :

Elles nous confirment que la planète n’a guère plus qu’une dizaine d’années pour réussir à reprendre le contrôle du changement climatique. Nos conclusions suggèrent un grand péril pour toutes les espèces animales, pas seulement les insectes mais tous les vertébrés. Quelles qu’en soient les raisons, climatiques ou autres, tous les scientifiques sont d’accord pour expliquer que plus de gens devraient prêter plus d’attention à cet "insectapocalypse".

Cette catastrophe pourrait en entraîner d'autres, puisque certaines plantes sauvages sont désormais menacées de disparition faute de fécondation par les insectes. Car, conclut le rapport il ne faut pas oublier que « 35 % au moins des récoltes du monde doivent absolument être pollinisées et qu’une grande partie de notre alimentation dépend de la survie des insectes et pas seulement des abeilles. Et nous espérons que cette réalité guérira les politiques de leur surdité ». Mais le problème, aux États-Unis comme en Europe ou sur le reste de la planète, est que la recherche et l’enseignement dans ce domaine sont considérés comme « inutiles » et « non rentables » depuis des décennies. Alors, les entomologistes sont également en voie de disparition, aussi bien dans les enseignements universitaires que dans les laboratoires.

Claude-Marie Vadrot, Politis le 22 octobre 2018

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