LA RÉVOLUTION DU LITHIUM

Publié le par Résistance verte

 

Le lithium, ce métal, nécessaire pour la fameuse transition énergétique, attise toutes les convoitises. En effet, le lithium est utile pour les batteries des ordinateurs, des téléphones portables, des voitures électriques, ainsi que pour les éoliennes.  Jusqu’à présent, le monde tournait au pétrole. Pourrait-il, demain, tourner au lithium ?

À QUOI SERT LE PÉTROLE ?

Avant de jeter le pétrole aux oubliettes, il est bon de se rappeler combien les êtres humains du XXIe siècle en sont dépendants.  Le pétrole fournit :
    •    le carburant et les lubrifiants ;
    •    les plastiques issus de la pétrochimie ;
    •    les engrais à base de pétrole ;
    •    le goudron et l’asphalte qui permettent de faire les routes ;
    •    la paraffine, utilisée pour conditionner la nourriture congelée ;
    •    les deux tiers des vêtements1 ;

Supprimez le plastique, l’asphalte et la plupart des vêtements et une bonne partie de votre quotidien disparaît.  Dit autrement, passer du pétrole à l’électrique dans les modes de transport ne va pas faire cesser l’utilisation du pétrole. Ce n’est qu’une toute petite partie du problème... En clair, malgré les discours ambiants en faveur des véhicules électriques et des éoliennes, la fin de l’extraction du pétrole n’est pas pour demain ! Est-ce que cette évolution permettra néanmoins de réduire les émissions de CO2 ? Peut-être. Mais à quel prix ? 

L’OR BLANC CACHÉ SOUS DES TRÉSORS DE LA NATURE

En réalité, la course au lithium et aux métaux rares est plus une priorité économique qu’écologique. Ce métal alcalin sert pour toutes les batteries. C’est une matière première indispensable pour le développement des objets connectés2. Ces derniers sont en plein essor. Et le développement de la 5G, puis de la 6G devrait accroître encore leur attractivité.  Le soudain enthousiasme partagé des industriels et des écologistes pour un monde électrique n’est peut être pas fondé sur les mêmes causes...  

Et la transition écologique voulue par le gouvernement français3 n’est qu’un habillage astucieux d’une nouvelle politique industrielle. Cela dit, aller chercher du lithium pour répondre à des besoins humains n’est pas forcément un problème en soi.  Malheureusement, ce lithium se trouve souvent sur des sites naturels exceptionnels ou préservés. Ce sont des régions qui n’ont pas été défigurées par l'industrialisation et l'urbanisation rampante. 

En Europe, c’est au nord du Portugal que se trouvent les plus grandes réserves du précieux métal alcalin. C’est une région agricole un peu oubliée du monde. C’est un endroit paisible de collines et de rivières qui a su développer le tourisme vert ces dernières années4. La région devrait perdre de son côté bucolique, même si les pouvoirs publics locaux et européens jurent que tout sera fait pour préserver les sites et éviter une pollution de l’eau. 

En Amérique Latine, c’est le désert de sel d’Atacama qui attire les entreprises minières.  C’est le plus vieux désert de la planète terre. Il abrite les plus anciennes météorites venues frapper la terre, il y a des millions d’années5. C’est un trésor naturel pour les Chiliens et pour tous les habitants de la terre. 
C’est aussi là que se trouveraient 40% des réserves de lithium du monde. Certains évoquent même le chiffre de 85% des réserves mondiales6 ! La région est appelée le “triangle d’or” du lithium, ou le triangle ABC car elle est partagée entre l’Argentine et la Bolivie, et le Chili. 

COMMENT SE FAIT L’EXTRACTION DU LITHIUM ?

95% du lithium exploité actuellement serait produit en pompant la saumure sous la terre et en laissant l’eau s’évaporer dans de grandes cuves7. On sépare ensuite le lithium de la saumure par électrolyse.  Ces techniques polluent beaucoup moins que les mines classiques comme celles de cuivre ou d’or par exemple. Restent deux problèmes : la consommation importante d’eau et la dénaturation potentielle de site lié à une suractivité humaine.

LES LOCAUX SONT-ILS CONSENTANTS ?

Près du désert d’Atacama par exemple, il existe d’extraordinaires lagons qui abritent des flamands roses et des espèces endémiques. Ces lagons sont verts, bleus foncés, rouges… Ils sont absolument extraordinaires et des touristes du monde entier viennent les visiter8. Les populations locales s’inquiètent de voir ces sites détruits d’autant que pour certaines tribus amérindiennes locales, ils sont un caractère sacré.  Par ailleurs, la création de sites d’exploitation, de grandes cuves et l’aller-retour incessant des camions a obligé un certain nombre d’habitants à migrer alors qu’ils avaient toujours vécu là6. Que ce soit au Portugal ou en Amérique Latine, une partie grandissante de la population locale s’élève contre ces projets. Auront-ils gain de cause ? 

QUE FAUT-IL PENSER DE CETTE “RÉVOLUTION VERTE” ?

Pour l’instant, il s’agit davantage d’une substitution énergétique que d’une transition énergétique. On utilise un peu moins de pétrole et un peu plus de métaux… Rien n’est proposé pour limiter la pollution liée aux grands changements numériques que nous sommes en train de vivre.  Par exemple, l’archivage des données par les GAFAM dans d’immenses serveurs, répartis un peu partout aux Etats-Unis ou ailleurs, pose un problème écologique majeur. Ces ordinateurs géants réchauffent activement la planète et personne ne s’en émeut9. Vous avez sûrement des milliers de mails, peut-être des centaines de milliers de mails dans votre messagerie électronique. Ces informations sont stockées sur un ou deux ordinateurs géants, peut-être plus. Ils dégagent une chaleur conséquente qui n’est pas toujours utilisée et dont personne ne se soucie. De même qu’il existe un système de triage des déchets, les données devraient être traitées et détruites. On n’y est pas encore...  Par ailleurs, les actions menées pour limiter la consommation d’énergie restent limitées. En France, près de 75% des travaux de rénovation des habitations réalisés en 2020 n’ont pas pris en compte l’isolation. Ainsi, ces maisons rénovées n’ont pas changé de catégorie DPE10… Or le chauffage et la climatisation font partie des activités humaines les plus polluantes qui existent...

Au niveau politique et même médiatique, nous manquons d’une vision d’ensemble sur l’utilisation des ressources naturelles et sur leur effet sur l’environnement. À moins que Jean-Marc Jancovici, l’ingénieur qui prévoit l’effondrement des ressources d’ici 50 ans, n’ait raison. Une fois que les niveaux de pétrole, de cuivre et de minéraux seront trop bas pour continuer à alimenter la surchauffe du monde, les êtres humains seront obligés de s’adapter et d’effectuer des changements drastiques11.

Qui vivra, verra !

Julien

1. https://www.mtaterre.fr/dossiers/le-revers-de-mon-look/avec-quoi-sont-fabriques-nos-vetements

2. https://www.saftbatteries.com/fr/l-%C3%A9tude-de-cas/batteries-pour-les-objets-connect%C3%A9s-cas-client-deutsche-telekom/

3. https://www.manche.gouv.fr/Politiques-publiques/Amenagement-territoire-energie/Developpement-Durable/La-transition-ecologique

4. https://www.youtube.com/watch?v=yq7kSGchEAA

5. https://lareleveetlapeste.fr/le-plus-vieux-desert-du-monde-meurt-pour-les-batteries-de-nos-voitures-vertes/

6. https://reporterre.net/Corruption-pollution-consommation-les-ravages-du-lithium-en-Argentine

7. http://environnement.vdc4.org/2017/08/18/lextraction-du-lithium-les-faits-vs-les-fakes/

8. https://www.adiosparis.fr/tour-du-monde/amerique-latine/bolivie/desert-atacama-4x4

9. https://weather.com/fr-FR/france/environnement/news/2018-11-16-vieux-mails-archives-source-de-pollution-meconnue

10. https://www.geoplc.com/particuliers/tremi-statistiques-renovation-energetique-maisons-individuelles/

11. https://www.youtube.com/watch?v=3GyOYNwk5AM

Publié dans Environnement

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